vendredi 29 janvier 2010

REVENIR SUR NOS PAS...


27 janvier 2010

Nous avons décidé d’aller visiter le parc National Del Este situé à 120 milles nautiques de Samana, dans le sud-est de la République Dominicaine. La météo nous annonce une navigation « sportive ». Bien que nous nous sentons un peu fatigués pour entamer une navigation de 24h, nous nous sentons aptes à naviguer dans les conditions annoncées dû à l’expérience acquise ces derniers mois. Dans les 2 premières heures de navigation, nous avons la chance de voir 3 baleines sauter hors de l’eau; 2 étant très loin et la dernière à ½ mille du bateau. Assez impressionnant! La navigation va bien; nous naviguons au près serré (vent de face) par vent de 20-25 nœuds et des vagues de 10 à 15 pieds aux 7 secondes. Nous nous sentons à l’aise dans ces conditions même si nous avons le cœur un peu sur la flotte, car ce n’est pas l’allure la plus confortable, mais le bateau avance très bien. Et puis, nous pêchons une belle petite daurade.

Malchance! Peu de temps après, nous traversons un champ de filets de pêche à la traîne. Notre hélice en attrape un. Après maintes manœuvres au moteur avant/arrière, nous ne nous en sortons pas! L’hélice est bien prise, tellement qu’elle coule à pic! Sur le moment, lorsque nous voyons qu’une partie du filet se libère, nous nous disons : l’hélice est coincée, mais lorsque Ghislain entend le son du moteur, il réalise de plus en plus qu’il ne doit plus y avoir d’hélice du tout... Bon, au moins il y a du vent! Nous reprenons donc notre route en se dirigeant vers Punta Macao, l’un des seuls ports sur notre route où nous pourrons y passer la nuit et, du même coup, plonger pour voir l’état des dommages. Nous voyons l’entrée, nous savons que nous ne devons pas manquer notre coup pour l’ancrage (sans l’aide du moteur...), car les falaises sont proches... Rapidement, nous évaluons la situation : les vagues sont trop fortes; ce sera difficile de plonger et nous ne serons pas bien protégés pour la nuit. Vite, nous faisons un virement de bord avant de perdre toute notre vitesse. Nous avons toujours l’intention de nous rendre au parc Del Este, mais nous naviguerons toute la nuit. Et du même moment, Ghislain échange avec les gens en place sur la radio. Ils essaient de voir les possibilités d’ancrage et nous notons la météo. Nous prenons finalement la décision de faire demi-tour et de retourner à Samana et ce, malgré les 70 milles nautiques parcourus aujourd’hui.

Du temps perdu? Pas vraiment, puisque du temps, nous en avons! C’est avant tout une question de SÉCURITÉ! Faut se poser les bonnes questions et réagir vite!

D’abord, nous connaissons les lieux, donc nous savons déjà où nous allons ancrer, car il ne faut pas oublier que l’ancrage ne se fera qu’à voiles et ce, en présence d’un bon vent. Ensuite, un peu plus loin se trouvent les hauts fonds de Hourglass Bank, lesquels sont à traverser avec beaucoup de précautions et fortement conseillés de passer cette zone à moteur afin d’être plus manœuvrable. Et finalement, après notre visite du parc Del Este, lorsque nous voudrons revenir pour traverser le passage Mona vers Puerto Rico, vers l’Est, nous savons que chaque mille vers l’Est sera durement gagné. C’est décidé, nous revenons sur nos pas. Nous faisons aussitôt un virement de bord. Nous nous retrouvons maintenant au travers/largue, donc beaucoup plus confortable. Olivier a déjà été malade ce matin et maintenant, Ghislain se « met dans le trouble » en arrangeant la daurade à 4 pattes dans le cockpit, rien pour l'aider!

Myriam avance vraiment bien, 8-9 nœuds. Nous dépassons Magie qui nous suivait 5-6 milles derrière. Eux aussi ont décidé de rebrousser chemin. Quel beau geste d’amitié! « On ne sait pas comment on peut vous aider, mais on est là si vous avez besoin. Juste le support moral peut-être? » Et nous de répondre : « Évidemment, votre présence est grandement appréciée » sur la radio VHF.

Nous sommes bien conscients que la partie n’est pas gagnée! Nous sommes loin d’être arrivés et surtout ancrés! Ghislain, quel bon capitaine! Nous nous sentons tellement en sécurité auprès de lui. Il semble toujours maîtriser la situation et a toujours la solution. Ce soir là, comme je l’ai rarement vu, il semble très vulnérable. D’abord, il est très touché par la présence, les conseils et les bons mots d’encouragement des gens sur la radio (réseaux à Montréal), quel beau support jour après jour! Et puis, il sent toute la pression sur ses épaules. Mais vous le connaissez, il retombe très vite sur ses pieds! Rapidement, il se fait très rassurant et en contrôle. Donc, nous naviguons 100% voiles jusqu’à notre arrivée à l’île Cayo Levantado vers 1h du matin (île où nous avons ancré la veille, située tout juste avant l’entrée du port de Samana). Nous avons pas mal de vent et n’avons qu’une seule chance de bien nous ancrer. Si nous manquons cette chance, nous risquons de nous échouer, de nous échouer dans le sable, mais nous échouer quand même et sans moteur, il est difficile de se sortir de là. Nous sommes très confiants, car notre procédure d’ancrage est bien rodée; le gros de notre défi demeure le vent. On ne peut pas freiner le bateau comme on veut et l’espace est limitée. Bref, Ghis et moi sommes stressés et bien concentrés sur ce que chacun a à faire. Comme à l’habitude, Ghis est à la barre et moi je suis à l’avant prête à mouiller l’ancre. « Annie, quand j'te dis drop, il faut que ça drop! » J’étais prête! Heureusement, l’ancrage se déroule très bien. Rapidement, le voilier est stabilisé. On semble bien tenir, car là aussi, on ne peut tester notre ancrage en mettant le moteur à la renverse, jusqu’à ce qu’il tourne à 2500 tours comme à l’habitude… Ouf! Une bonne chose de faite! Nous affalons la grand-voile, nous mangeons une bouchée et décompressons un peu avant d’aller au lit vers 2h. Nous dormons déjà lorsque Magie arrive vers 3h. Eux, ont essuyé 2 grains. D’ailleurs, c’était l’une de nos craintes. Nous savions qu’un grain arrivait pour avoir parlé avec Magie quelques minutes auparavant. S’il faut en plus ancrer sous le grain avec les rafales de vent que cela comporte... Ouf, pas de grains! C’est à croire que nous avons une bonne étoile!


28 janvier 2010

Le lendemain, Captain Fuego est de bonne heure pour plonger. Il n’a pas eu à plonger bien loin pour confirmer qu’il n’y avait plus d’hélice. Ce n’est pas une grande surprise, mais je m’attendais quand même à un miracle. Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir! Pourquoi avons-nous perdu notre hélice? Peut-être les manoeuvres avant/arrière en pleine mer... Pourtant, il est logique que notre bateau soit conçu pour ce genre de manoeuvres... C'est certain que Ghislain essaie de trouver des solutions afin d'éviter la perte d'une 3e hélice (rappelez-vous que c'est notre 2e hélice que nous perdons, la 1re étant aux Bahamas dans les Berrys). Lorsque nous sortirons le bateau de l'eau pour un bon nettoyage de la coque, notre capitaine aura sûrement trouvé la solution! Mais bon, l'heure n'est pas aux questionnements, mais bien aux agissements! Ghislain se dirige dans le port de Samana pour voir si notre ami Jo peut nous aider, moyennant un petit pourboire… Nous sommes bien contents de le connaître ce chic type. Nous convenons qu’il vienne à notre rencontre à l’entrée du port vers 11h. Tout l’équipage du Myriam se prépare donc pour la manœuvre : lever l’ancre, nous diriger dans le port sous voiles, puis affaler lorsque Jo pourra nous escorter jusqu’à notre boule de mooring. Le vent se lève! Lorsque nous levons l’ancre, nous venons tout près de Magie... sur Magie.., tous essaient de repousser Myriam pour ne pas que les bateaux ne se touchent. Myriam touche au devant tribord de Magie crochissant l’un de leur chandelier. Chit! Sur Myriam, le stress est bien palpable… Nous réussissons à nous sortir de là et à repartir en direction du port. Les défenses sont installées (protection lorsque la chaloupe de Jo nous escortera) et les amarres aussi (cordages pour que Jo puisse nous tirer). Notre entrée dans le port se passe bien. Mais le vent tombe et nous ne voyons pas Jo. Nous préparons tout pour un ancrage d’urgence s’il y a lieu. Magie nous suit de près. Pourtant il est 11h pile. Oui, je regarde avec les jumelles et je le vois. Jo arrive Ghislain! Nous lui indiquons que nous tournerons face au vent pour affaler la grand-voile. Par la suite, nous nous attachons à lui. Nous avons juste à diriger Myriam vers la boule d’ancrage. Nous réussissons à nous attacher au mooring. C’est fait! Ouf! Nous pouvons décompresser un peu! Aussitôt, Ghislain va en ville pour trouver l’adresse de UPS où nous ferons livrer une nouvelle hélice. Hier, en navigation, il avait déjà parlé avec Guité Marine pour commander une hélice. Efficace hein! À son retour, il s’empresse de rappeler Guité Marine pour leur fournir l’adresse de livraison. Oui, nous avons une bonne étoile puisque l’hélice peut partir de Montréal aujourd’hui. Bien entendu, nous ne sommes pas pressés. Myriam est en sécurité ainsi que tout son équipage. Puis, il y les baleines que nous aimerions bien aller observer de plus près. La petite ville est charmante; il nous reste une cascade à aller voir. Et, nous voulons peut-être louer une voiture pour aller visiter l’intérieur du pays. Évidemment, de savoir que nous aurons notre pièce rapidement est très réconfortant.

Nous n’avons pas l’intention de reprendre la navigation pour aller visiter le parc National Del Este. Nous profiterons de notre séjour ici pour voir tout ce qu’il y a à voir et pour nous reposer un peu avant de reprendre la navigation vers Puerto Rico lorsque nous aurons une belle fenêtre météo. Malheureusement, c’est probablement ici à Samana que nous vivrons nos derniers moments avec Magie, eux se dirigeant vers Cuba, puis éventuellement vers la maison. Nous les savourons tous!

Bilan de cette autre aventure, une fois la poussière retombée : nous sortons grandis de cette facheuse expérience. Encore une fois, nous avons appris beaucoup!


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